PRIMES AUX FONCTIONNAIRES TERRITORIAUX : LE CONSEIL D’ÉTAT MET LES POINTS SUR LES « I »

Le Palais-Royal vient d’annuler l’arrêt d’une cour administrative d’appel qui avait ouvert la voie à une appréhension plus libérale du principe de parité entre fonctions publiques d’État et territoriale en matière de définition des conditions de versement du Rifseep. Explications.

Les marges de manœuvre accordées aux collectivités dans la fixation de leur régime indemnitaire resteront restreintes. Par une décision du lundi 22 novembre, le Conseil d’État a annulé un arrêt de la cour administrative d’appel de Nancy de novembre 2020 qui avait ouvert à la voix à une appréhension plus libérale du principe de parité entre fonctions publiques d’État et territoriale s’agissant des primes versées aux agents des collectivités. Et plus précisément des conditions de versement du fameux Rifseep, le régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l’expertise et de l’engagement professionnel.

Le ministère de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales s’était en effet pourvu en cassation contre cet arrêt par lequel la cour avait considéré que les collectivités territoriales pouvaient choisir d’accorder à leurs agents un régime plus avantageux que celui des agents de l’État sur certains points. À condition, néanmoins, que le plafond global du Rifseep fixé pour les agents de l’État ne soit pas dépassé.

L’affaire portait sur une délibération prise par la commune ardennaises de Charleville-Mézières en 2017 et instituant au profit de ses agents ce régime indemnitaire comprenant deux éléments : une indemnité de fonctions, de sujétions et d’expertise (IFSE) et un complément indemnitaire annuel (CIA). L’État demandait l’annulation de cette délibération au motif qu’elle prévoyait le maintien du versement intégral de l’IFSE aux fonctionnaires placés en congé de longue durée ou en congé de longue maladie.

Pas de régime plus favorable pour les territoriaux

Or, explique le Conseil d’État dans sa décision, la commune ardennaise “ne pouvait légalement prévoir le maintien de plein droit” de l’IFSE au profit de ses agents placés en tels congés. Le Palais-Royal ne nie pas pour autant que les dispositions statutaires relatives à la territoriale établissent “qu’il appartient à l’organe délibérant de chaque collectivité ou établissement public local de fixer lui-même la nature, les conditions d’attribution et le taux moyen des indemnités bénéficiant” à ses fonctionnaires.

Il ne faut pas toutefois que le régime ainsi institué “puisse être plus favorable que celui dont bénéficient les fonctionnaires de l’État d’un grade et d’un corps équivalents” à ces mêmes fonctionnaires territoriaux. Les collectivités, par ailleurs, ne sont pas tenues de faire bénéficier leurs fonctionnaires de régimes indemnitaires identiques à ceux des fonctionnaires d’État.

Surtout, il résulte des dispositions législatives et réglementaires que les fonctionnaires de l’État placés en congé de longue maladie ou de longue durée “n’ont pas droit au maintien des indemnités attachées à l’exercice des fonctions, au nombre desquelles figure l’IFSE”, est-il indiqué dans la décision du Conseil d’État.

“Erreur de droit” de la cour de Nancy

Pour le Palais-Royal, ainsi, la cour administrative d’appel de Nancy “a commis une erreur de droit” en jugeant que le régime indemnitaire mis en place par la commune de Charleville-Mézières “n’était pas plus favorable que celui dont bénéficient les fonctionnaires de l’État exerçant des fonctions équivalentes” et que, “par suite”, le principe de parité entre les agents de l’État et de la territoriale “n’avait pas été méconnu”. 

Le Conseil d’État annule donc l’arrêt de la cour administrative d’appel, confirmant ainsi l’illégalité de la délibération de la commune de Charleville-Mézières, comme l’avait fait le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en première instance sur déféré du préfet des Ardennes. Le débat est désormais clos, le Palais-Royal ayant donné raison à l’État.