REPORT DE CONGÉS NON PRIS : QUID DE L’APPLICATION DE LA JURISPRUDENCE EUROPÉENNE ?

“Les dispositions des décrets relatifs aux congés annuels des fonctionnaires français, en ce qu’elles ne prévoient pas le report des congés non pris en raison d’un congé de maladie, sont incompatibles avec la directive européenne sur l’aménagement du temps de travail”, souligne le député socialiste Régis Juanico. Pas besoin de réécrire les textes, lui répond le gouvernement : “le droit communautaire s’impos(e) directement aux citoyens européens”.

À quand un texte réglementaire pour intégrer la jurisprudence européenne sur la question du report des congés non pris dans la fonction publique ? Ce n’est pas à l’ordre du jour, fait savoir le gouvernement dans une réponse à une question écrite du député socialiste Régis Juanico.

“Le droit communautaire s’impos(e) directement aux citoyens européens, sans qu’il soit nécessaire pour les États membres de le retranscrire par des actes juridiques nationaux, rappelle l’exécutif dans cette réponse. Une clarification du droit applicable en matière de report de congés annuels pour cause de maladie ne pourrait d’ailleurs être envisagée que dans le cadre d’une approche commune aux trois versants de la fonction publique.” La réponse émane du ministère de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales.

Complexité d’appréhension et d’application dans la territoriale

Le parlementaire interrogeait en effet précisément le gouvernement sur la situation qui prévaut dans la fonction publique territoriale. Une situation “pas satisfaisante” à ses yeux : “La question du report des congés n’est pas facile à appréhender et encore moins à appliquer, notamment dans les collectivités qui ne disposent pas toujours de services RH spécialistes du droit européen”. 

Le député pointait notamment une “incertitude” s’agissant de la non-évolution de la réglementation française en la matière. “Les dispositions des décrets relatifs aux congés annuels des fonctionnaires français, en ce qu’elles ne prévoient pas le report des congés non pris en raison d’un congé de maladie, sont incompatibles avec la directive européenne sur l’aménagement du temps de travail”, expliquait Régis Juanico dans sa question.

À l’heure actuelle, en effet, un décret de novembre 1985 sur les congés des territoriaux pose le principe selon lequel les congés dûs pour une année ne peuvent être reportés sur l’année suivante. Sauf autorisation exceptionnelle donnée par l’autorité territoriale.

Primauté de la directive européenne

En 2009 et 2011, malgré tout, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a estimé que la directive européenne sur le temps de travail faisait obstacle à l’extinction du droit au congé annuel lorsque le travailleur a été en congé maladie. Application du droit communautaire oblige, il n’y a donc pas besoin de modifier les textes réglementaires, selon l’exécutif.

“Les agents publics placés en congé de maladie peuvent donc bénéficier du report des congés annuels non pris”, souligne ainsi le gouvernement dans sa réponse en se référant aussi à la jurisprudence du Conseil d’État.

Ce droit au report des congés non pris n’est pas pour autant illimité puisqu’il “s’exerce dans les limites définies par le juge communautaire”. Ce dernier estime en effet “qu’une demande (…) présentée au-delà d’une période de quinze mois [suivant] l’année au titre de laquelle les droits à congés ont été ouverts (…) peut être rejetée par l’employeur”. D’autre part, ce report doit s’exercer dans la limite d’un congé de quatre semaines.