RETRAITES : L’IDÉE D’UNE RIPOSTE INTERSYNDICALE ÉMERGE

Yves Veyrier, secrétaire général de Force ouvrière, espère que les principales centrales s’opposeront d’une seule voix à la retraite à 65 ans.

Tous les syndicats rejettent la retraite à 65 ans, mais réussiront-ils à exprimer leur hostilité d’une même voix ? L’idée d’un discours commun commence, en tout cas, à émerger. Lors de la manifestation du 1er-Mai à Paris, Yves Veyrier, le secrétaire général de FO, a plaidé, avec ardeur, en faveur d’une démarche collective contre la volonté d’Emmanuel Macron de repousser l’âge d’ouverture des droits à une pension. « J’espère que nos cinq confédérations seront capables de le dire nettement et clairement », a-t-il affirmé, en faisant allusion à sa centrale et aux quatre autres qui sont représentatives à l’échelon interprofessionnel (CFDT, CFE-CGC, CFTC, CGT).

A la mi-octobre 2020, les responsables de ces organisations avaient corédigé un texte qu’ils avaient envoyé au premier ministre, Jean Castex, avec copie au chef de l’Etat. Les signataires de ce courrier avaient alors demandé que la réforme instituant un système universel de retraites, suspendue à l’époque à cause de l’épidémie de Covid-19, ne soit pas remise à l’ordre du jour d’ici à la fin de la législature. Comme ce projet avait finalement été abandonné, le patron de FO pense que l’initiative des syndicats avait eu une influence sur la décision de l’exécutif.

Recours au « droit à manifester »

« On a dit qu’on était tous opposés au recul de l’âge légal de départ à la retraite, a argumenté M. Veyrier, dimanche 1er mai, en s’adressant aux journalistes. Maintenant, il faut que ça se matérialise. » Et de souligner que « ça marquerait (…) les esprits ». Il est même allé jusqu’à évoquer l’hypothèse d’un recours au « droit à manifester, droit à la grève s’il le faut ». Avant de préciser : « J’espère qu’on n’aura pas besoin d’en arriver là. » Au lendemain du second tour de la présidentielle, le leader syndical avait déjà écrit à ses homologues pour leur suggérer d’« examiner des possibilités d’actions communes », comme l’a révélé l’agence de presse AEF.

« On peut se voir à cinq, mais pas sur les bases [de cette lettre] », confie Laurent Berger, le secrétaire général de la CFDT, en faisant valoir que celle-ci est la « reprise » d’une déclaration publiée le 31 mars par les instances de FO. De son côté, Philippe Martinez, le numéro un de la CGT, explique que sa confédération a « répondu favorablement à l’idée d’une rencontre des cinq syndicats ». Elle fera suite, si elle a lieu, à un autre temps d’échange, qui s’est déroulé « avant le premier tour de la présidentielle », explique-t-il.

François Hommeril, le président de la CFE-CGC, est également partant. Il soutient même qu’on « fera tout pour avoir une expression à cinq sur la retraite à 65 ans ». En revanche, le dirigeant de la CFTC, Cyril Chabanier, se montre plus prudent. Il approuve l’idée d’une réunion, tout en signalant l’existence de « vraies différences » entre organisations de salariés au sujet des retraites, si bien que le principe d’une position commune n’est « pas évident ».

En dehors des cinq confédérations représentatives au niveau interprofessionnel, d’autres syndicats sont partisans d’une action unitaire. C’est par exemple le cas de Solidaires. Sa codéléguée générale, Murielle Guilbert, a rappelé, dimanche, lors de la manifestation parisienne du 1er-Mai, que « la dernière grande mobilisation [sociale] » avait été déclenchée, fin 2019, par le projet de système universel de pensions. « Il ne faudrait pas qu’Emmanuel Macron l’oublie », a-t-elle mis en garde.

Bertrand Bissuel
2 mai 2022
Le Monde