POINT D’INDICE : LES ÉLUS LOCAUX FONT REMONTER LEUR INQUIÉTUDE À MATIGNON

Le projet de décret actant le dégel de 3,5 % de la valeur du point d’indice a recueilli un avis favorable tacite du Conseil national d’évaluation des normes (CNEN). Si son collège des élus se dit “conscient de la nécessité” d’une telle revalorisation, il critique la méthode utilisée par le gouvernement sur un texte “aux impacts substantiels immédiats” sur les collectivités. Des remarques détaillées dans un courrier que le président du CNEN, Alain Lambert, vient d’adresser à la Première ministre.

Le dégel annoncé du point d’indice de la fonction publique continue d’inquiéter au sein du monde local, qui sait combien cette revalorisation pèsera sur le budget des collectivités. Une inquiétude dont le collège des élus locaux du Conseil national d’évaluation des normes (CNEN) vient de se faire le relais. Matignon vient en effet de saisir en “extrême urgence” le CNEN sur le projet de décret actant ce dégel de 3,5 %.

Au final, le texte a reçu un “avis favorable tacite”, lundi 4 juillet, de la part de cette instance dont les avis, pour rappel, sont purement consultatifs. Aux termes des dispositions du code général des collectivités territoriales, en effet, un avis favorable tacite est réputé avoir été rendu par le CNEN dans les 72 heures suivant la saisine en “extrême urgence” si aucune séance du Conseil n’a été organisée dans ce délai.

Or le CNEN ne s’est pas réuni. Les associations d’élus locaux représentées en son sein ont néanmoins été consultées, et ont donc proposé un avis favorable tacite, assorti d’une série de remarques, malgré tout. Ou plutôt des critiques, qui sont résumées dans un courrier que le président du CNEN, Alain Lambert, vient d’adresser à la Première ministre, Élisabeth Borne.

Pas de concertation en amont

Le collège des élus – majoritaire au sein du CNEN – et leurs associations représentatives déplorent ainsi “unanimement” la “méthode” utilisée par le gouvernement et la saisine en “extrême urgence” sur un projet de décret “qui aura des impacts substantiels immédiats pour les employeurs publics”. Pour la seule fonction publique territoriale, le coût de la mesure est estimé à 2,272 milliards d’euros en année pleine et à 1,136 milliard d’euros pour l’année 2022, le dégel n’ayant vocation à être applicable qu’à partir du 1er juillet.

Cette méthode, ajoute Alain Lambert dans son courrier, “est d’autant plus critiquable que la concertation préalable n’a pas été menée en amont” par le ministère de la Transformation et de la Fonction publiques. L’occasion pour le président du CNEN de rappeler la nécessité, selon lui, pour les ministères porteurs, de consulter les associations d’élus en amont de l’examen des projets de texte “pour que le CNEN puisse jouer pleinement son rôle d’instance de dialogue entre les élus et les administrations centrales”.

“Tendance inquiétante de dépenses nouvelles” 

Au-delà de la forme, ce sont aussi les conséquences du dégel du point d’indice qui sont pointées du doigt par le collège des élus du CNEN. “Cette décision s’inscrit dans une tendance inquiétante de dépenses nouvelles pour les communes, leurs groupements, les départements et les régions, qui doivent faire face à une hausse significative des prix des matières premières et de l’énergie, ainsi que dans la perspective de la définition du nouveau cadre des relations financières entre l’État et les collectivités”, souligne Alain Lambert. Une allusion aux 10 milliards d’euros d’économies qu’Emmanuel Macron s’est engagé, pendant la campagne présidentielle, à demander aux collectivités.

Malgré ces critiques et ces inquiétudes, les représentants des élus se disent “conscients de la nécessité de revaloriser les traitements” dans la fonction publique, au vu notamment du “contexte économique actuel” marqué par une forte inflation. Le collège des élus du CNEN évoque aussi “l’urgence tenant à la publication de ce projet de décret en vue de permettre son entrée en vigueur pour l’ensemble des agents publics, en particulier les plus fragiles”. D’où cet avis favorable tacite.