UNE ÉTUDE ALERTE SUR LA MORTALITÉ PLUS PRÉCOCE DES ADJOINTS TECHNIQUES TERRITORIAUX

Selon une étude de la direction des politiques sociales de la Caisse des Dépôts, les agents titulaires du cadre d’emploi de catégorie C des adjoints techniques territoriaux ont une espérance de vie à 65 ans, qui est en moyenne inférieure de près de deux années à celle de l’ensemble des hommes dans la population française. La conséquence de la pénibilité des tâches qu’ils accomplissent ?

 

 

Agent de propreté des espaces publics, agent de déchèterie ou de services polyvalent, ou encore agent des interventions techniques. Ces métiers à dominante masculine appartiennent au cadre des adjoints techniques territoriaux. Le dernier numéro de la publication « Questions politiques sociales », éditée par la direction des politiques sociales de la Caisse des Dépôts, met en évidence la « vulnérabilité particulière » de ce cadre d’emplois qui regroupe près du tiers des effectifs employés par les collectivités et leurs établissements publics (31,4%, selon le Centre national de la fonction publique territoriale).

A 65 ans, les hommes qui relevaient du régime de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) – autrement dit les fonctionnaires – et qui étaient des adjoints techniques territoriaux avaient en effet, en 2017, une espérance de vie nettement plus faible que l’ensemble des hommes dans la population française. Leur espérance de vie à 65 ans s’élevait en moyenne à 17 ans et 4 mois, contre 19 ans et 3 mois pour la population générale. L’écart était de près de 2 années (1 an et 11 mois).

Retraite pour invalidité

« Dans ce qu’on appelle commodément la ‘filière ouvrière’ du cadre d’emplois des adjoints techniques territoriaux, on trouve des métiers qui sont traditionnellement assez exposés [à la pénibilité], en particulier dans les grandes agglomérations : les égoutiers, les éboueurs, les fossoyeurs », a souligné Michel Yahiel, directeur des politiques sociales de la Caisse des Dépôts, lors de la présentation de l’étude à la presse, ce 13 décembre. Le cadre d’emplois compte aussi un certain nombre de métiers « un peu moins exposés, mais pour lesquels il y a beaucoup de pathologies du travail », par exemple ceux des « jardiniers » et des « bûcherons ».

Autre caractéristique du cadre d’emplois : les hommes fonctionnaires et en retraite qui en relevaient sont plus souvent partis en retraite pour invalidité que les autres affiliés à la CNRACL (17%, contre 11% pour l’ensemble des pensionnés de la CNRACL).

Pour les femmes qui appartiennent au cadre d’emplois des adjoints techniques territoriaux, l’espérance de vie à 65 ans était en 2017, là encore, inférieure à ce qu’elle était pour les femmes dans la population française. Mais l’écart n’était plus que de 3 mois en défaveur des femmes du cadre d’emplois (22 ans et 9 mois, contre 23 ans et 2 mois).

Catégorie active

La plus faible espérance de vie des adjoints techniques territoriaux semble imputable à leurs conditions de travail. Mais pour quelle proportion par rapport à d’autres facteurs, comme le niveau d’études, les revenus, la qualité de l’alimentation, ou le fait de fumer ? Une réponse à cette question nécessiterait des études complémentaires, selon l’équipe de chercheurs de la direction des politiques sociales.

On notera aussi qu’une partie des adjoints techniques territoriaux (comme les égoutiers) relèvent de la catégorie active permettant un départ en retraite à partir de 57 ans (à la condition d’avoir exercé 17 années en catégorie active). Mais, selon l’étude, le fait de bénéficier de la catégorie active influence peu l’espérance de vie : « Chez les hommes comme chez les femmes, l’espérance de vie à 65 ans des fonctionnaires positionnés sur des emplois de catégorie active est très similaire à celle des sédentaires ».

Le cadre d’emplois des adjoints techniques territoriaux méritait un coup de projecteur, puisque 63% des hommes de catégorie hiérarchique C de la fonction publique territoriale sont comptabilisés dans celui-ci. Leur plus faible espérance de vie influe donc assez fortement sur le niveau de l’espérance de vie de l’ensemble des hommes de la catégorie C. En s’établissant en 2017 à 18 ans et 1 mois, celle-ci était inférieure de 1 an et 2 mois à celle de l’ensemble de la population française masculine (19 ans et 3 mois).

Femmes affiliées à la CNRACL : plus de 23 ans d’espérance de vie à 65 ans

Le cadre d’emplois regroupe 37% de l’ensemble des hommes fonctionnaires territoriaux et hospitaliers. Pour ces derniers, l’espérance de vie à 65 ans s’élevait à 18 ans et 9 mois – soit 6 mois de moins que celle des hommes au sein de la population française.

Pour les femmes fonctionnaires territoriales et hospitalières, la situation est assez différente : en 2017, leur espérance de vie à 65 ans s’élevait à 23 ans et 4 mois, soit 2 mois de plus que celle de l’ensemble des femmes de la population française.

Selon la direction des politiques sociales de la Caisse des Dépôts, « une mortalité plus précoce des personnes dans tel ou tel secteur d’activité peut constituer une alerte quant à l’existence de risques spécifiques en termes de santé au travail ». Sa connaissance permet de « guider la mise en place de politiques de prévention ».