LA RÉFORME DES RETRAITES DÉFINITIVEMENT ADOPTÉE, CE QUI ATTEND LES FONCTIONNAIRES

Report de l’âge légal, allongement de la durée de cotisation, prolongation d’activité, portabilité des droits, extension de la retraite progressive, carrières longues… Après l’adoption définitive du projet de loi de réforme des retraites, Acteurs publics passe en revue les nombreuses mesures du texte qui concerneront la fonction publique.

L’Assemblée nationale a donc tranché. Après le rejet de 2 motions de censure, lundi 20 mars, le projet de loi de réforme des retraites est désormais considéré comme définitivement adopté par le Parlement. Saisi par la Première ministre, Élisabeth Borne, et par la gauche et le RN, le Conseil constitutionnel va désormais se pencher sur ce texte. En attendant sa décision, voici un tour d’horizon des nombreuses dispositions du projet de loi intéressant la fonction publique.

Contrairement à la réforme prévue lors du premier quinquennat d’Emmanuel Macron, les règles de calcul des retraites ne changent pas. Celles-ci restent basées sur les six derniers mois d’activité (contre les 25 meilleurs années dans le privé, comme pour les contractuels) et sur le seul traitement indiciaire des fonctionnaires, leurs primes n’étant toujours pas prises en compte dans le calcul de leurs futures retraites.

Report de l’âge légal pour les fonctionnaires sédentaires…

C’est la disposition phare du projet de loi. Si le texte était approuvé par le Conseil constitutionnel puis promulgué par le président de la République, Emmanuel Macron, l’âge légal de départ à la retraite serait alors reporté de deux ans pour atteindre 64 ans en 2030 contre 62 ans aujourd’hui. Une mesure qui s’appliquera à tous les travailleurs français et donc également aux fonctionnaires. Dans le détail, le texte prévoit ainsi de relever progressivement l’âge d’ouverture des droits à la retraite, à raison de trois mois par année, à compter du 1er septembre de cette année, pour atteindre la cible des 64 ans pour les fonctionnaires sédentaires. La première génération qui se verrait appliquer cet âge de départ de 64 ans serait celle née en 1968. Quand aux contractuels, affiliés au régime général de retraite, ceux-ci se voient appliquer les mêmes règles de report de l’âge légal de départ.

… et pour les catégories actives.

Le texte relève aussi l’âge légal de départ à la retraite des fonctionnaires des catégories qui bénéficient actuellement d’un départ anticipé à la retraite : à 57 ans pour les catégories actives (sapeurs-pompiers, égoutiers, infirmiers…) et à 52 ans pour les “superactifs” (policiers, surveillants pénitentiaires…). Le projet de loi prévoit ainsi également de relever progressivement cet âge légal pour atteindre 59 ans pour les actifs (à partir de la génération 1973) et 54 ans pour les “superactifs” (à partir de la génération 1978). En revanche, les durées de service actif exigées pour bénéficier du droit au départ anticipé n’évoluent pas. Elles restent ainsi fixées à 17 ou 27 ans selon les métiers.

Accélération de l’allongement de la durée de cotisation.

C’est la seconde “mesure d’âge” du projet de loi. Déjà prévu dans la réforme Touraine de 2014, cet allongement de la durée de cotisation nécessaire pour partir à la retraite à taux plein va ainsi s’opérer sur un calendrier moins resserré. Le calendrier d’atteinte de l’objectif de 43 années (soit 172 trimestres) va en effet être accéléré à raison de trois mois par année pour l’ensemble des fonctionnaires. En 2030, la cible de 172 trimestres serait ainsi applicable à partir de la génération 1965 pour les fonctionnaires sédentaires, alors qu’elle devait initialement être atteinte à partir de la génération 1973. Pour les fonctionnaires actifs, elle sera atteinte à partir de la génération 1970 (contre 1976 initialement) et à partir de 1975 pour les “superactifs” (contre 1981 initialement). Les contractuels seront également concernés par cette accélération de l’allongement de la durée de cotisation.

Pas de modification de l’âge d’annulation de la décote.

Malgré le report de l’âge légal de départ à la retraite, les règles applicables pour le calcul de la surcote et de la décote ne changent pas. Les âges d’annulation de la décote (la minoration de la retraite) restent ainsi les mêmes. À savoir 67 ans pour les fonctionnaires de droit commun – les fonctionnaires sédentaires –, 62 ans pour les catégories actives et 57 ans pour les “superactifs”.

Adaptation du dispositif des carrières longues.

“Comme tous les assurés, les fonctionnaires bénéficient du renforcement des dispositifs ouvrant droit au départ anticipé”, explique la direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP), en référence notamment à l’adaptation du dispositif dit des carrières longues, qui permet aux personnes ayant commencé à travailler tôt de partir plus tôt à la retraite. Actuellement, un début de carrière avant 20 ans permet un départ anticipé de deux ans (soit 60 ans aujorud’hui). Une entrée dans la vie active avant 16 ans, quant à elle, donne aujourd’hui droit à une retraite anticipée de quatre ans (soit 58 ans aujourd’hui). Ce dispositif va être adapté avec de nouvelles bornes d’âge, en lien avec le report de l’âge légal : ceux qui ont commencé à travailler entre 20 et 21 ans pourront partir un an plus tôt (soit à 63 ans) ; ceux qui ont débuté avant 20 ans pourront partir deux ans plus tôt (soit à 62 ans) ; ceux qui ont commencé avant 18 ans pourront faire valoir leur droit à la retraite quatre ans plus tôt (soit à 60 ans) et ceux qui ont démarré avant 16 ans pourront terminer leur carrière six ans plus tôt (soit à 58 ans).

Prolongation d’activité jusqu’à 70 ans.

Avec son projet de loi, le gouvernement ne compte pas seulement demander aux agents publics de travailler plus longtemps. Il souhaite aussi “favoriser” l’allongement de leur vie professionnelle en leur permettant de prolonger s’ils le souhaitent leur carrière au-delà de la limite d’âge de 67 ans. Les agents qui le demanderont (les fonctionnaires sédentaires et les contractuels) pourront ainsi continuer à travailler jusqu’à leurs 70 ans, soit trois ans de plus qu’actuellement. Le refus de l’employeur devra être motivé. Cette faculté était aujourd’hui limitée, le gouvernement souhaite donc désormais systématiser ces possibilités de poursuite d’activité en les élargissant.

Portabilité des droits.

Le projet de loi prévoit que l’ensemble des services en catégorie active soit pris en compte pour bénéficier d’un départ anticipé, même si le fonctionnaire a changé de métier durant sa carrière. Une portabilité des droits est ainsi prévue pour les fonctionnaires des catégories actives. Les fonctionnaires ayant appartenu à plusieurs catégories actives pourront cumuler leurs années de “service actif”, ce qu’ils ne peuvent pas faire à l’heure actuelle. Des mesures sont également prévues pour les contractuels ayant exercé des fonctions équivalentes à celles des fonctionnaires relevant de la catégorie active. Contrairement à aujourd’hui, les périodes effectuées sur des emplois “actifs” ou “superactifs” en tant que contractuel seront prises en compte au moment de la titularisation de ces contractuels. Et ce dans la limite de dix ans pour remplir la condition de durée en services actifs (dix-sept ans) ou superactifs (vingt-sept ans) permettant un droit au départ anticipé à la retraite.

Suppression de la “clause d’achèvement”.

Le projet de loi acte la fin de cette clause pour les fonctionnaires des catégories actives. Elle imposait la fin d’activité sur l’emploi “actif” pour bénéficier des droits acquis sur cet emploi et donc d’un départ anticipé à la retraite. Les fonctionnaires en question pourront ainsi désormais conserver ces droits en cas de mobilité notamment.

Extension de la retraite progressive au secteur public.

Le projet de loi étend à la fonction publique ce dispositif qui existe aujourd’hui uniquement dans le privé. Il permettra aux agents publics en fin de carrière de travailler à temps partiel tout en percevant une partie de leur pension de retraite. Pour en bénéficier, les agents publics devront avant tout justifier d’une durée d’assurance minimum (au moins 150 trimestres), mais aussi avoir atteint un âge minimal, inférieur de deux ans à l’âge légal de départ à la retraite. À savoir 62 ans à terme, en 2030, contre 60 ans dans le régime de retraite progressive actuellement en vigueur dans le secteur privé. Conséquence du report de l’âge légal de départ à la retraite, l’âge minimal pour bénéficier de la retraite progressive sera en effet lui aussi parallèlement avancé, au rythme de trois mois par an, pour atteindre la cible de 62 ans en 2030. Fin 2030, ce dispositif devrait donc être accessible à partir de 60 ans et trois mois, puis 60 ans et six mois en 2024…

Une surcote anticipée pour certaines mères de famille.

Dans le privé comme dans la fonction publique, une surcote ou majoration de pension allant jusqu’à 5 % sera accordée aux femmes qui, sous l’effet des trimestres validés au titre de la maternité et de l’éducation des enfants, dépasseront les 43 annuités requises pour une pension à taux plein un an avant l’âge légal de départ, soit à 63 ans. Chaque trimestre travaillé donnerait lieu à une surcote d’1,25 % et les quatre trimestres de la dernière année d’activité, à une surcote de 5 %.

Un départ facilité pour les enseignants du premier degré.

Le projet de loi assouplit les conditions de départ à la retraite des professeurs des écoles. Le texte supprime ainsi une disposition du code de l’éducation qui oblige aujourd’hui ces derniers à attendre à la fin de l’année scolaire pour partir à la retraite même s’ils ont atteint leur date anniversaire au cours de cette même année scolaire. Cette spécificité ne s’appliquait pas aux enseignants du second degré.