RETRAITES : CENSURE D’UNE MESURE FAVORABLE AUX CATÉGORIES ACTIVES DE LA FONCTION PUBLIQUE

Dans sa décision sur la réforme des retraites, le Conseil constitutionnel a censuré la disposition visant à mieux prendre en compte la pénibilité subie par les contractuels et à leur permettre un départ anticipé à la retraite. C’était un « cavalier social » selon les Sages. Malgré cette censure, le gouvernement compte bientôt remettre cette mesure sur la table. 

La mesure aura subi le même sort que l' »index sénior ». Dans sa décision sur le projet de loi de réforme des retraites, le Conseil constitutionnel a décidé de censurer une disposition censée être favorable à certains contractuels. A savoir la mesure visant à mieux prendre en compte la pénibilité subie par ces derniers et à leur permettre ainsi un départ anticipé à la retraite.

C’était un « cavalier social », ont en effet considéré les Sages de la Rue Montpensier. A leurs yeux, cette mesure n’avait pas sa place dans la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 (LFRSS 2023) au vu de son impact insuffisant, voire nul, sur les comptes sociaux de cette année.

La mesure en question visait précisément à améliorer la prise en compte de la pénibilité des contractuels ayant exercé des fonctions équivalentes à celles des fonctionnaires relevant des catégories actives. Lesquels bénéficient aujourd’hui d’un départ anticipé à la retraite : les sapeurs-pompiers, les égoutiers, les infirmiers, les policiers, les surveillants pénitentiaires, les contrôleurs de la navigation aérienne, …

« Pas d’effet » sur les recettes et les dépenses 

Contrairement à la situation actuelle, les périodes effectuées sur des emplois « actifs » ou « superactifs » en tant que contractuel auraient été prises en compte au moment de la titularisation d’un agent contractuel. Et ce dans la limite de 10 ans pour remplir la condition de durée en services actifs ou superactifs (17 ou 27 ans) permettant un droit au départ anticipé à la retraite. Une mesure introduite dans le projet de loi par le gouvernement pour, d’une certaine manière, compenser le report de deux ans de l’âge légal de départ à la retraite. La mesure, néanmoins, n’aurait été appliquée qu’à partir des « services » accomplis par lesdits contractuels au moment de la publication de la loi de réforme des retraites.

« Dès lors, ces dispositions n’ont pas d’effet sur les recettes ou les dépenses de l’année des régimes obligatoires de base ou des organismes concourant à leur financement », estime le Conseil constitutionnel. Aussi, ajoutent les Sages, ces dispositions « ne trouvent pas leur place » dans la LFRSS 2023 et « sont donc contraires à la Constitution ». D’où leur censure par la Rue Montpensier qui rejoint ainsi l’argumentaire des députés et sénateurs de gauche auteurs des saisines devant le Conseil constitutionnel.

S’ils reconnaissaient que cette mesure aurait offert de « nouveaux droits pour les agents publics contractuels », ces parlementaires la considéraient en effet également comme un « cavalier social ». « Ces dispositions ne sauraient avoir un impact financier direct sur les régimes obligatoires de base de la Sécurité sociale pour 2023 car les services accomplis en 2023 par des agents contractuels titularisés ne feront l’objet d’une conversion que dans plusieurs années », expliquaient ainsi les députés de la Nupes dans leur saisine.

Le sujet bientôt remis sur la table 

Le constat des sénateurs de gauche était le même : la mesure, soulignaient-ils, « ne sera susceptible de produire un effet sur les dépenses qu’une fois que l’agent contractuel concerné, ayant accompli de tels services plusieurs années après l’entrée en vigueur de la loi et étant devenu ultérieurement titulaire, demandera la liquidation de sa pension de retraite ».

Pour rappel, le Conseil d’État avait lui-même alerté le gouvernement sur le risque d’inconstitutionnalité d’une telle mesure. Dans sa note de fin février sur le projet de réforme des retraites, le Palais Royal suggérait ainsi à l’exécutif de retirer du texte cette mesure de prise en compte de la pénibilité aux contractuels, celle-ci pouvant être regardée comme « cavalier social ». Un conseil que le gouvernement n’avait donc pas décidé de suivre. Il se fait aujourd’hui taper sur les doigts par le Conseil constitutionnel par la censure de cette disposition favorable aux contractuels.

Malgré cette censure, l’exécutif ne compte pas en rester là et se dit prêt à remettre sur la table ce sujet de la pénibilité des contractuels. Comme l' »index séniors », « ce sont des mesures importantes », a déclaré le ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, Stanislas Guerini, ce samedi 15 avril au lendemain de la décision du Conseil constitutionnel. « Il ne faut pas qu’elles soient abandonnées, ces mesures doivent être remises dans la discussion avec les syndicats mais aussi avec les parlementaires, a-t-il développé. Il faudra bien trouver les voies et moyens pour que ces mesures puissent s’appliquer ». Avant que les Sages rendent leur verdict, le gouvernement Borne s’était déjà dit prêt (en cas de censure) à réintégrer la mesure favorable aux contractuels dans un autre projet de loi.