PLAINTE, BOUTON D’ALERTE, FORMATION : CE QUE CONTIENT LE PLAN DE PROTECTION DES AGENTS DE LA FONCTION PUBLIQUE

Le ministre de la Fonction publique, Stanislas Guerini, vient de dévoiler le contenu du plan de protection des agents publics face aux violences et menaces auxquelles ils peuvent être confrontés. Les administrations pourront désormais porter plainte en cas d’agression d’un de leurs agents, ce qui n’est pas possible aujourd’hui sauf en cas de dégradation d’un équipement.

“Mieux mesurer, mieux prévenir et mieux protéger”. Voilà les 3 axes du “plan de protection des agents publics” que le ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, Stanislas Guerini, vient de dévoiler. Un plan destiné “en priorité” aux agents de guichet, qui sont “en première ligne devant les Français”. “Les agents publics, notamment de guichet, font face à des violences diverses, inacceptables et inexcusables, a souligné le ministre ce lundi 18 septembre sur RMC. Il ne faut plus jamais laisser seuls les agents face à la violence.” 

Les chiffres parlent pour eux-mêmes, a indiqué Stanislas Guerini, en évoquant un “nombre important” d’agents confrontés à des violences, même s’il n’existe pas encore de suivi précis de ces violences à l’échelle nationale. Reste que, pour le seul secteur de la santé, 35 000 cas d’agression ont été recensés en 2021 ; 12 000 actes d’incivilité ont également été enregistrés dans les caisses d’allocations familiales (CAF) en 2022 et une hausse de 20 % des actes d’incivilité a été recensée par Pôle emploi entre 2020 et 2023. Plus récemment, les émeutes urbaines de fin juin-début juillet, marquées par plusieurs dégradations de bâtiments publics mais aussi par des violences à l’égard d’agents publics, ont entraîné le déplacement de 10 000 agents publics.

Fait particulièrement inquiétant, a développé Stanislas Guerini, l’intensité des agressions à l’égard des agents publics “est de plus en plus importante”. Et conduit parfois au pire, comme l’ont illustré plusieurs récents événements dramatiques qui ont endeuillé la fonction publique, notamment la séquestration puis le meurtre d’un agent du fisc ou encore l’assassinat d’une professeure par l’un de ses élèves en plein cours.

Un “Comité de protection des agents publics”

Aucune mesure consolidée n’existant aujourd’hui, le plan du gouvernement vise donc tout d’abord à “mieux mesurer” les agressions et actes de violence commis au sein des services publics. Un baromètre va ainsi être créé pour mesurer toutes les incivilités et violences subies par les agents publics. Son lancement est prévu début 2024. Un “Comité de protection des agents publics”, réunissant les employeurs des 3 versants ainsi que les directions des opérateurs, est également institué.

Pour “mieux prévenir” les menaces et violences dont les agents publics peuvent faire l’objet, l’exécutif pousse à la mise en place de “dispositifs de sécurisation” et “d’équipements de protection”, comme des boutons d’alerte ou des caméras de vidéoprotection dans les services publics les plus exposés. À ce propos, Stanislas Guerini a annoncé l’activation d’un “fonds d’accélération” d’1 million d’euros pour le déploiement de ces différents dispositifs.

Dans cette logique de prévention, le gouvernement table aussi sur des opérations de sensibilisation et de formation “internalisées”. Une formation des agents à la prévention et à la lutte contre les incivilités va ainsi être déployée à partir de novembre. Un accord national est également en cours de préparation entre le ministère de l’Intérieur et le ministère de la Fonction publique pour déployer des actions de prévention de la part des forces de l’ordre auprès des services publics “pour les accompagner dans l’aménagement de leurs sites et la prévention des situations conflictuelles”.

Le dépôt de plainte par l’employeur, une nouveauté

Le troisième axe du plan gouvernemental, “mieux protéger”, se traduit notamment par une évolution de la législation pour permettre le dépôt de plainte de l’employeur pour le compte des agents publics. Cette mesure sera inscrite dans le prochain projet de loi de réforme de la fonction publique, qui doit être présenté d’ici la fin de l’année.

“Aujourd’hui, une administration ne peut pas porter plainte à la place d’un agent sauf s’il y a un dommage matériel”, a souligné Stanislas Guerini en évoquant des situations parfois “absurdes”. À titre d’exemple, si un usager casse une porte, l’administration peut porter plainte contre lui en raison de ce dommage matériel. En revanche, si le même usager casse le bras d’un agent mais sans dégrader d’équipement, l’administration ne peut pas porter plainte.

Selon le ministère de la Fonction publique, le cadre actuel découragerait les agents publics de porter plainte : “Un agent n’a souvent pas le réflexe de porter plainte car il faut y consacrer du temps, et cela entraîne parfois un sentiment de résignation des agents.” Une “forme de double peine”, a conclu Stanislas Guerini.

La protection fonctionnelle étendue à la famille

Une extension de la protection fonctionnelle est également prévue pour les ayants-droit des agents publics “à titre conservatoire”. Ainsi, si un agent public est victime de menaces, notamment de menaces de mort, celui-ci pourra demander le déclenchement pour lui et sa famille de la protection fonctionnelle, qui consiste notamment en la prise en charge des frais d’avocat, des frais de soins psychologiques… Cette extension de la protection fonctionnelle existe déjà pour certains agents, notamment ceux de la police et de la pénitentiaire. “Je souhaite étendre ces dispositifs à tous les agents publics”, fait savoir Stanislas Guerini.

Le ministre insiste aussi sur l’importance de la réponse pénale apportée aux faits de violences à l’égard des agents publics. “Parce qu’aucune violence ne doit rester impunie, toute plainte signalée d’un agent public doit être traitée systématiquement par le parquet et assortie d’un rappel à la loi à l’usager”, affirme Stanislas Guerini. À ce titre, des travaux sont actuellement menés par le ministère de la Fonction publique et le ministère de la Justice pour “faciliter et accélérer les procédures en cas d’agression d’un agent à travers un lien renforcé entre le parquet et les administrations”.