FONCTION PUBLIQUE TERRITORIALE : UN QUARANTIÈME ANNIVERSAIRE MARQUÉ PAR DES « INTERROGATIONS »
Philippe Laurent, président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT) a posé le 10 janvier un regard inquiet sur la fonction publique territoriale, pointant la remise en cause du « mouvement de décentralisation » et la perte d’attractivité des emplois territoriaux. Et ce alors que l’on célébrera prochainement les 40 ans de la loi portant dispositions statutaires sur la fonction publique territoriale.
A quelques jours du quarantième anniversaire de la loi du 26 janvier 1984 qui a posé les fondements de la fonction publique territoriale et créé le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT), le président de cette instance de dialogue, Philippe Laurent, soulève « plusieurs interrogations et préoccupations » concernant la fonction publique territoriale. « La loi du 26 janvier 1984 a permis la structuration et la montée en compétences de nos administrations publiques locales », s’est réjoui le maire de Sceaux ce 10 janvier au cours de la cérémonie des vœux du CSFPT qui, pour cause de formation du nouveau gouvernement, s’est tenue à Paris sans Dominique Faure et Stanislas Guerini, les deux ministres du gouvernement Borne en charge respectivement des collectivités territoriales et de la fonction publique. Mais « nous sommes conduits (aujourd’hui) à nous interroger sur la pérennité du mouvement de décentralisation que je fais commencer à la remise du rapport d’Olivier Guichard » (en 1976), a-t-il regretté.
En outre, la fonction publique territoriale connaît « une perte accélérée d’attractivité », s’est alarmé celui qui est aussi vice-président de l’Association des maires de France. Comme dans le rapport qu’il avait remis début 2022 à la ministre de la Fonction publique de l’époque, Amélie de Montchalin, sur l’attractivité de la fonction publique territoriale, Philippe Laurent a pointé les niveaux trop faibles des rémunérations des agents employés par les collectivités : « il n’est pas normal que la moitié des agents publics territoriaux gagne moins de 1,5 fois le Smic ». Il en a conclu qu’ »il faut augmenter la rémunération des agents publics de la fonction publique territoriale ».
Négociations salariales
Quarante ans après les lois de décentralisation qui ont augmenté les responsabilités des exécutifs locaux, « nous ne pouvons plus continuer à subir des décisions concernant notamment le point d’indice sans négociations préalables et sans bases objectives », a estimé par ailleurs Philippe Laurent. Qui, comme les autres élus locaux, a été échaudé en juin dernier par les décisions prises unilatéralement par le gouvernement concernant les rémunérations des agents publics. Stanislas Guerini a proposé d’organiser de façon « pérenne » la négociation salariale chaque année dans la fonction publique, avec une application des mesures décidées l’année suivante : « tant mieux », a considéré le président du CSFPT, en disant qu’ »il y a urgence ».
« Un service public de qualité qui a besoin d’une fonction publique compétente et d’une vraie décentralisation des responsabilités. Tel est le vœu que je forme aujourd’hui », a déclaré Philippe Laurent.
Lors de cette cérémonie de vœux qui se déroulait notamment en présence de la directrice générale des collectivités locales, Cécile Raquin, le président du CSFPT a aussi souhaité que l’accord « historique » du 11 juillet 2023 (voir notre article) définissant un socle minimal de garanties au profit des agents territoriaux en matière de prévoyance soit « traduit le plus rapidement possible au cours de l’année 2024 en textes législatifs et réglementaires ». Lors d’une réunion du CSFPT en groupe de travail, le 20 décembre dernier, la DGCL avait indiqué que la mise en œuvre de l’accord nécessiterait de modifier non seulement des décrets, mais aussi l’ordonnance du 17 février 2021 concernant la protection sociale complémentaire dans la fonction publique. Cette dernière évoque en effet la notion de « montant de référence », alors que l’accord signé l’été dernier prévoit que l’employeur territorial verse un montant d’aide d’au moins 50% de la cotisation. « Ce n’est pas parce que c’est compliqué qu’il ne faut pas le faire et on va le faire », a lancé Philippe Laurent.
Agenda social de la fonction publique territoriale
Au cours de la matinée, le bureau du CSFPT avait tenu une réunion. L’occasion d’évoquer l’agenda social de la fonction publique territoriale, une demande des organisations syndicales à laquelle le ministre en charge de la Fonction publique a donné son feu vert en novembre dernier (voir notre article). Cet agenda de discussions portera entre autres sur la protection sociale complémentaire (volet prévoyance et volet santé), la prévention de l’usure professionnelle (sur la base du rapport remis en novembre par Michel Hiriart), les agents faisant fonction d’Atsem, ou encore la revalorisation des secrétaires de mairie (plus exactement sur les textes réglementaires permettant l’application de la loi qui vient d’être publiée).
Le président du CSFPT a par ailleurs indiqué avoir reçu de la part de Stanislas Guerini un courrier lui demandant de relancer le groupe de travail sur les concours, en vue de la préparation de mesures qui devraient figurer dans le projet de loi de réforme de la fonction publique (dont la présentation, il y a encore quelques semaines, était annoncée pour février 2024). L’objectif est de « professionnaliser » et « simplifier » les modalités des concours de la fonction publique territoriale, indique une source bien informée.