LES BIAIS SEXISTES ONT LA VIE DURE DANS LA TERRITORIALE

Si les stéréotypes de genre persistent dans les collectivités, le corpus réglementaire montre toute son efficacité, de même que l’émergence d’un nouveau modèle de jeunes dirigeants constitue une amorce de progrès, selon l’Association des administrateurs territoriaux de France.

Le sexisme est-il une réalité dans la territoriale et les femmes doivent-elle toujours en faire davantage pour réussir ? C’est notamment pour répondre à ces questions que l’Association des administrateurs territoriaux de France (AATF) a réalisé une enquête sur les biais sexistes et les stéréotypes de genre auprès de ses adhérents dans le cadre de la commission “égalité” de l’association.

“Si les choses avancent, il est primordial de poursuivre le travail de sensibilisation envers les hommes sur ces sujets-là”, a expliqué Françoise Belet, déléguée nationale à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes à l’AATF, lors de la présentation des résultats. “Il y a certes beaucoup de travail, mais on observe des amorces d’évolution dans certaines réponses qui sont plus équilibrées”, a complété Fabienne Sporh, directrice générale des services de la ville d’Épinal.

Les femmes ont été les plus nombreuses à répondre aux questions et constituent près de 72 % de l’échantillon majoritairement issu de communes et d’intercommunalités, mais aussi de départements. Premier enseignement : 81 % des répondants estiment que les femmes doivent faire plus que les hommes pour réussir leur vie professionnelle. Une situation qui intervient dans un contexte où les biais de genre semblent encore avoir la vie dure.

Ainsi, 70 % des personnes interrogées disent avoir déjà entendu un homme, au sein de leur collectivité, faire du mansplaining, c’est-à-dire reformuler les propos d’une femme. Par ailleurs, la moitié des personnes interrogées affirment que lors des réunions d’encadrement de leur collectivité, l’équilibre des temps de parole entre les femmes et les hommes n’est pas respecté. De même, lors de l’organisation d’événements dans les collectivités, l’équilibre entre les femmes et les hommes au niveau des intervenants n’est pas systématiquement recherché, près de 68 % des répondants affirmant que ce n’est pas le cas.

Stéréotypes et “mansplaining”

Les biais sexistes semblent pourtant reculer dans le cadre des entretiens de recrutement. Par exemple, à la question : “Vous a-t-on déjà interrogé sur la prise en charge des enfants, ou avez-vous vous-même posé la question si vous êtes recruteur”, plus de 80 % des répondants disent non.

Pourtant, à en juger par les propos entendus dans les couloirs des collectivités, les biais sexistes semblent être toujours bel et bien présents. Près de 66 % des sondés disent avoir déjà entendu des phrases porteuses de stéréotypes de genre selon lesquels les hommes auraient des compétences naturelles, comme l’autorité ou la détermination, autres que celles des femmes, auxquelles sont associées la douceur ou le sens de l’écoute. Ou d’autres phrases du type : “Elle est trop autoritaire, elle est pire qu’un homme”.

Les biais sexistes sont donc toujours bel et bien présents, mais selon les membres de la commission “égalité professionnelle” de l’AATF, on peut tout de même constater que les choses progressent. “En fin de questionnaire, nous avons posé différentes questions ouvertes à nos adhérents qui nous ont permis de mettre au jour de nombreuses bonnes pratiques”, observe Françoise Belet.

À noter que la réglementation a aussi largement contribué à faire reculer les biais sexistes, notamment au niveau des entretiens de recrutement et grâce aux plans d’action en faveur de l’égalité professionnelle, qui incitent les collectivités à agir. Il semble aussi qu’un nouveau modèle de dirigeant émerge. “Les jeunes sont davantage sensibilisés à l’égalité et quand ils seront aux responsabilités, on verra peut-être la bascule”, espère Fabienne Sporh. Autant d’avancées qui ne doivent pas faire oublier les efforts qu’il reste encore à fournir sur le terrain.