SUPPRESSION DES CATÉGORIES ET NOUVELLE STRUCTURATION DES FILIÈRES DE LA FPT : POSITION DES EMPLOYEURS TERRITORIAUX

Suppression des catégories hiérarchiques (A, B et C) et nouvelle structuration des filières dans la Fonction Publique Territoriale : la coordination des employeurs territoriaux prend position.

La coordination des employeurs territoriaux, à l’occasion d’une réunion de concertation sur le projet de loi pour l’efficacité de la fonction publique le 30 avril 2024, a exprimé les craintes suivantes concernant la suppression des catégories hiérarchiques dans la Fonction Publique Territoriale :

-Crainte que la suppression des catégories hiérarchiques conduise à une remise en cause du statut de la fonction publique ;

-Crainte que la réflexion sur les filières soit menée d’abord pour l’Etat puis transposée pour la territoriale, ce qui ne serait pas adapté aux réalités de ce versant ;

– Crainte que le dialogue social sur ce sujet soit compliqué, car la suppression des catégories et la mise en place de filières ne fait pas partie des demandes des organisations syndicales, qui s’articulent prioritairement autour des revalorisations salariales, des modalités de promotion et de l’égalité professionnelle ;

Pertinence des catégories telles qu’elles existent actuellement selon la coordination des employeurs territoriaux :

-le système de catégories est parfois décalé au regard du niveau de diplôme atteint par les candidats aux concours ; toutefois, la coordination des employeurs territoriaux soulignent que c’est probablement moins vrai pour la territoriale, qui compte 75% d’agents de catégorie C ;

-Elle confirme que la revalorisation d’un métier, qui ne peut aujourd’hui se traduire que par un passage de catégories, n’a pas toujours de sens, lorsqu’elle ne repose que sur une question de rémunération et non sur une logique de niveau de compétences requis (ex. des aides-soignants qui sont passés catégorie B, alors que le niveau de recrutement est en réalité resté le même) ;

– Elle rappelle le fort attachement des agents publics aux catégories, qui sont un véritable ancrage dans le statut, et leur souhait de pouvoir passer dans la catégorie du dessus, qui représente une forme de « rite de passage », surtout pour l’accès à la catégorie A ;

-Elle souligne que si les catégories ne permettent effectivement pas de reconnaître les métiers, il existe d’autres outils pour individualiser la rémunération autour du métier, comme le RIFSEEP – même s’il est reconnu que celui-ci ne permet pas une reconnaissance dans l’indiciaire qui compte pour la retraite et qu’il a progressivement été dévoyé.

Réflexion autour de la structuration des filières selon la coordination des employeurs territoriaux :

-la logique de filière n’est pas nouvelle pour la FPT, même si elle n’emporte aujourd’hui aucune conséquence juridique ;

-La coordination des employeurs territoriaux s’interroge sur les modalités pour créer ces filières et craint qu’un schéma étatique ne leur soit imposé, en ne considérant pas les métiers spécifiques de la FPT ;

– Alors qu’il est rappelé que ces filières seraient déterminées à la suite d’un travail de plusieurs années réalisé dès le départ en format 3 versants, la coordination des employeurs territoriaux doutent que le versant territorial puisse véritablement avoir la main sur de possibles filières très largement composées de cadres d’emplois de la FPT ;

-Elle considère même qu’en cas de filière mono-versant FPT, cela risque de permettre des évolutions spécifiques à celle-ci, ce qui porterait atteinte au principe d’unicité de la FP auquel la CET est attachée ;

-Les employeurs territoriaux craignent que la réforme induise le passage d’une FP de carrière à une FP de métier, avec la suppression d’emplois lorsqu’un métier disparaît – quand bien même il est rappelé que les grades et corps et cadres d’emplois ne seraient pas supprimés, et que les agents resteraient titulaires de leur grade ;

-La coordination des employeurs territoriaux s’interroge sur l’existence de systèmes similaires à l’international, et se demandent en outre si la réforme simplifiera le paysage par rapport au schéma actuel : elle rappelle qu’une telle modification d’ampleur ne saurait être réalisée que « la main tremblante » ;

-Elle souligne que le passage à une telle logique de filières professionnelles serait un véritable changement de paradigme, tant à l’échelle nationale puisque cela nécessiterait que la représentation des employeurs territoriaux soit organisée pour contribuer à la gouvernance des filières où des métiers de la territoriale seraient présents, qu’à l’échelle de chaque collectif de travail / individu, compte tenu des nouvelles modalités d’organisation de la carrière que cela impliquerait ;

– Elle relève enfin que les filières étant toujours constituées de niveaux, qui pourraient être de nombre plus important ou moins important que les 3 catégories existant actuellement, et positionnés selon des échelles pouvant différer par filière, on pourrait considérer que les catégories pourraient en partie perdurer dans ce nouveau schéma.

Intérêt / impact d’une logique de filières en matière :

De mobilité :

– Les employeurs territoriaux confirment que la facilitation des mobilité ascendantes est l’une de leurs préoccupations, et que la mise en place de filières professionnelles, parce qu’elles sont précisément articulées autour de parcours ascensionnels liés à des compétences acquises dans un domaine professionnel donné, permet d’y apporter une réponse intéressante – sous réserve de préciser les modalités de promotion (redéfinition de la place de la promotion interne, de l’examen professionnel, du concours) ;

-Certains employeurs territoriaux partagent l’objectif de favoriser la mobilité, notamment inter-versants, tout en doutant que la mise en place de filières professionnelles permette de la faciliter, d’autant qu’elle est aujourd’hui très limitée ;

-D’autres employeurs s’interrogent par ailleurs sur l’intérêt pour un employeur de faciliter la mobilité, les collectifs de travail ayant besoin de stabilité, plus que d’agents en mouvement. Ils soulignent par ailleurs que la question de la mobilité horizontale ne concerne que les grandes collectivités, et que les agents territoriaux aspirent aujourd’hui à faire carrière au sein d’une même collectivité ;

-D’autres comparent la perspective des filières professionnelles avec les conventions collectives qui existent dans le privé : ils soulignent les difficultés de faire des mobilités sur des métiers relevant de conventions collectives différentes, et relèvent que le fonctionnement des filières devra éviter un tel écueil ;

D’attractivité / de recrutement :

-Les employeurs territoriaux soulignent que les catégories, étant un système ancien, sont bien connues des candidats, ce qui ne sera pas le cas des filières : ils craignent que cela rende le système moins lisible ;

De dialogue social :

– Les employeurs territoriaux considèrent que le dialogue social par filières sera compliqué à mettre en œuvre et ce, d’autant plus que les organisations syndicales sont défavorables à la suppression des catégories ;

-La coordination des employeurs territoriaux s’interroge sur la place du CSFPT et du CCFP – il est rappelé que ceux-ci perdureront dans leur forme actuelle, et examineront les textes réglementaires relatifs aux filières qui auront simplement été travaillés préalablement dans le cadre de celles-ci ;

De rémunérations :

– Les employeurs partagent les objectifs de réduction des écarts salariaux entre les femmes et les hommes et de revalorisation des métiers en tension, et considèrent que ce système de filière pourrait les faciliter ;

– Ils considèrent par contre que le schéma proposé fait courir le risque d’une amplification des revendications catégorielles ;

– Ils considèrent également qu’il n’est pas pertinent d’envisager les filières comme une modalité pour concentrer la refonte des grilles sur certains métiers plutôt que sur d’autres, considérant que toutes les filières sont en tension et questionnant la solution à adopter si un métier en tension ne l’est finalement plus – même s’ils reconnaissent que les collectivités comme l’Etat ne disposent pas pour l’heure des moyens suffisants pour procéder à la revalorisation de l’ensemble des grilles.

16 mai 2024
naudrh.com