LES QUOTAS DE PROMOTION BIENTÔT SUPPRIMÉS DANS LA FONCTION PUBLIQUE ?

Dans le cadre de la concertation sur la nouvelle réforme à venir de la fonction publique, l’exécutif a avancé plusieurs pistes pour faciliter les promotions internes de fonctionnaires. Le ministre, Stanislas Guerini, s’est même dit prêt à aller jusqu’à la suppression, dans la loi, des quotas de promotion afin de donner davantage de marges de manœuvre aux employeurs sur le terrain.

Fluidifier les mobilités et mieux gérer les parcours professionnels en permettent aux fonctionnaires d’évoluer plus facilement. C’est l’un des objectifs que le gouvernement Attal vise au travers de la nouvelle réforme de la fonction publique, qui doit être présentée à l’automne. Une réforme qui devrait notamment traiter la question de la promotion interne.

Depuis plusieurs semaines, le ministre de la Fonction publique, Stanislas Guerini, ne cesse en effet de réaffirmer sa volonté de “bousculer les règles du jeu” dans la fonction publique afin, en particulier, de permettre aux agents de “bouger plus facilement”. Lors d’un échange avec l’Association des journalistes d’information sociale (Ajis), le 24 mai dernier, le ministre a ainsi rappelé son intention de “faire sauter des verrous” sur “des règles qui s’appliquent de la même manière à tout le monde et enlèvent des marges de manœuvre”. Stanislas Guerini avait pris l’exemple des quotas de promotion des fonctionnaires.

Dans la fonction publique, le nombre de promotions internes qui peuvent être prononcées est en effet limité par des quotas puisqu’il existe une obligation législative de contingenter les promotions internes en fonction du nombre de recrutements par concours. C’est notamment le cas dans la territoriale, où ce fameux principe de “contingentement” demeure, avec la règle désormais fixée du “1 pour 2”, c’est-à-dire qu’un fonctionnaire ne peut être promu que si 2 recrutements ont été opérés par d’autres voies, comme le concours. Un mécanisme qui a d’ailleurs été récemment assoupli.

Reste que cette obligation peut constituer un frein à la promotion interne et n’est pas toujours adaptée aux situations réelles de recrutement. Et ce d’autant plus avec le recrutement croissant de contractuels, qui “est venu fragiliser les équilibres sur lesquels le système statutaire de promotion interne est gagé”, regrette ainsi la Coordination des employeurs territoriaux.

Faire confiance aux employeurs

Le gouvernement souhaite donc aller encore plus loin aujourd’hui afin de faciliter les promotions des fonctionnaires et d’en “démultiplier” les possibilités. Le tout en donnant des marges accrues en matière de promotion interne vers un corps ou un cadre d’emplois de niveau supérieur. “La fonction publique vit beaucoup de rigidités et de contraintes imposées d’en haut et de façon, au fond, très monolithiques”, avait ainsi critiqué Stanislas Guerini lors d’un échange avec des agents publics début mai.

“On doit redonner des marges aux employeurs et leur faire confiance”, avait-il ajouté en se disant même prêt à aller jusqu’à la suppression, dans la loi, des quotas de promotion pour en faire un sujet fixé “non plus à l’échelle nationale”. Au contraire, ce sujet pourrait être “renvoyé à la bonne échelle qui peut être celle d’un employeur directement et qui aurait la capacité à décider du bon équilibre entre les gens qu’il recrute à l’extérieur et les agents qu’il promeut à l’intérieur”, avait ensuite détaillé le ministre. Ce qui, selon lui, permettrait d’assurer une “grosse bouffée d’oxygène” pour donner davantage de perspectives de promotion aux fonctionnaires.

Plusieurs points d’attention en suspens

Le gouvernement vient d’ailleurs d’apporter de nouvelles précisions quant à ce nouvel assouplissement possible des modalités de promotion interne des fonctionnaires. Le ministère de la Transformation et de la Fonction publiques a en effet transmis fin mai aux syndicats et aux employeurs publics un document où sont récapitulés les “premiers enseignements” de la concertation sur le futur projet de loi de réforme, ainsi que des “points d’approfondissement proposés à la poursuite de la concertation”.

Sur cette question de la promotion interne, il y est ainsi fait état d’un “intérêt largement partagé” de “rendre possible le décontingentement des promotions internes en fonction du nombre des recrutements par concours”. Mais, explique le ministère, des “points d’attention demeurent sur la portée d’une telle évolution”, notamment en termes “d’égal accès et de visibilité pour les agents dans leur parcours de carrière” ou au sujet des “modalités d’encadrement ou de régulation qui seraient à prendre au niveau des employeurs”.

Aussi, parmi les “points d’approfondissement” pour la suite de la concertation sur la réforme, l’exécutif insiste-t-il sur les “conditions dans lesquelles ces marges de gestion seraient mobilisables”, “à quel niveau (décret, lignes directrices de gestion, versant, employeurs) (et) selon quelles garanties”. “Plus largement, ajoute le ministère, il faut s’interroger sur la place potentiellement renforcée à donner aux modalités de promotion interne qui valorisent l’expérience et l’engagement professionnel.” 

Le corollaire étant, selon l’exécutif, celui d’un “approfondissement de la question de la redéfinition éventuelle du rôle et de la place du concours interne dans la promotion interne”. Reste aussi à savoir comment articuler ces dispositifs de promotion interne avec la structuration par filières professionnelles souhaitée par Stanislas Guerini et qui pourrait remplacer l’actuelle organisation de la fonction publique par catégories.

Une nouvelle voie de promotion ?
Dans ses différents documents transmis aux syndicats et employeurs dans le cadre de la concertation sur la nouvelle réforme, le ministère de la Fonction publique évoque l’idée de mettre en œuvre une “nouvelle voie de promotion pour les fonctionnaires ayant validé une formation certifiante mise en place avec l’accord de l’employeur”. L’objectif : “développer les qualifications professionnelles” et permettre une meilleure gestion prévisionnelle des compétences, précise l’exécutif. “L’intérêt de mieux prendre en compte une formation certifiante pour progresser dans la carrière est le plus souvent reconnu”, explique le ministère. Cela soulève néanmoins “des questions pour plusieurs parties prenantes”, ajoute-t-il, en évoquant le “risque de traitement inéquitable des agents si la formation dépend de la volonté de la hiérarchie” ou encore la “difficulté pratique à concilier formation et obligations professionnelles”. Le ministère cite aussi “l’importance du nombre de formations dans certaines filières” qui peuvent “rendre difficile l’identification de celles qui justifieraient l’accès différencié à la promotion interne”. Pour la suite de la concertation, le gouvernement insiste sur la nécessité de définir les conditions et modalités d’accès à ce nouveau dispositif de promotion interne pour tenir compte de ces “points de vigilance” et pour “définir des lignes directrices définissant les situations où cette voie serait plus particulièrement pertinente ».