PROCÉDURES DISCIPLINAIRES : DÉBAT AUTOUR DU DROIT DES FONCTIONNAIRES DE SE TAIRE

Le Conseil d’État vient de transmettre au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) sur l’obligation ou non de notification du droit de se taire aux fonctionnaires qui font l’objet d’une procédure disciplinaire.

Le droit de se taire doit-il être obligatoirement notifié aux fonctionnaires qui font l’objet d’une procédure disciplinaire ? Voilà la question à laquelle le Conseil constitutionnel va devoir apporter une réponse après que le Conseil d’État lui a transmis une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) sur le sujet.

Cette QPC avait été soulevée par un sapeur-pompier qui demandait l’annulation de sa sanction disciplinaire de rétrogradation au grade de capitaine. À l’appui de sa requête, il avait posé une QPC à propos de la conformité à la Constitution des dispositions législatives relatives aux procédures disciplinaires dans la fonction publique.

À ses yeux, ces dispositions ne sont “pas conformes aux principes du droit à la présomption d’innocence et à celui des droits de la défense” au motif “que le droit au silence ne lui a pas été notifié lors de la procédure disciplinaire alors que les déclarations recueillies sont susceptibles d’être utilisées directement ou indirectement à son encontre”.

Devoir d’information pour l’administration

Selon l’article 9 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen (DDHC) de 1789, “tout homme étant présumé innocent jusqu’à ce qu’il ait été déclaré coupable, s’il est jugé indispensable de l’arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s’assurer de sa personne doit être sévèrement réprimée par la loi”. Par ailleurs, selon les termes de son article 16, “toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution”. Pour le Conseil d’État, comme on peut le lire dans sa décision de renvoi du 4 juillet, “il en résulte le principe selon lequel nul n’est tenu de s’accuser”. Un principe dont, selon lui, découlent donc aussi le droit de se taire et le principe des droits de la défense.

Comme le précise l’article L.532.4 du code général de la fonction publique, “le fonctionnaire à l’encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée a droit à la communication de l’intégralité de son dossier individuel et de tous les documents annexes”. Aussi, dans ce cas, “l’administration doit l’informer de son droit à communication du dossier” et “le fonctionnaire à l’encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée a droit à l’assistance de défenseurs de son choix”.

Le Conseil d’État le relève néanmoins : ces dispositions n’ont pas été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel. Surtout, ajoute le Palais-Royal, ces dispositions ne prévoient pas de notification obligatoire du droit de se taire aux fonctionnaires qui font l’objet d’une procédure disciplinaire. Aussi, selon lui, “le moyen tiré de ce que ces dispositions portent atteinte à la DDHC dont découlent le droit de se taire et le principe des droits de la défense soulève une question présentant un caractère sérieux”. Il renvoie donc au Conseil constitutionnel la QPC soulevée sur ce sujet.